samedi 19 janvier 2013

Chapitre IV: Le grand départ

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         Depuis le départ de son amie, Thomasine n’avait pas adressé la parole à sa mère. La nuit, avec Garance, s’était déroulé dans le silence. Au petit matin, dans le même silence lourd, Monsieur Bastille avait raccompagné la jeune fille à la gare après qu’elles se soient dit au revoir du bout des lèvres.

 Depuis, Thomasine vivait cloîtrée dans sa chambre, elle ne sortait que pour les repas, et après avoir pris son dîner dans un silence lourd, elle remontait dans sa chambre, le pas lourd, ne laissant entrer que son chat qui cherchait un espace d’accalmie.

Mais ce soir là, les choses étaient différentes…

Vers 9h, on frappa à sa porte.

-       Tom ?

C’était la voix de son père

-       Tom ? Laisse nous rentrer… S’il te plait… Il faut qu’on discute.

Thomasine voyait là une bonne occasion de rompre cette ambiance de plus en plus difficile à supporter. Elle posa son livre et quitta le fauteuil en osier qui la consolait pendant ces moments de peines et d’inquiétudes. Elle tourna la poignée de la porte et se trouva face à son père, suivi de sa mère. Elle se rendit compte soudainement qu’elle était quasiment aussi grande que celle-ci…

Elle retourna se loger dans son fauteuil tandis que ses parents choisirent le siège de bureau et le lit de princesse devenu « trop petite fille » à son goût.

-       Tom, … voilà…

Thomasine espérait qu’enfin le secret allait lui être révélé… Enfin, les efforts de Garance n’auront pas été vains.

-       … Ce qu’on va te dire est difficile…

Thomasine sentait son souffle devenir plus court

-       Chéri, nous sommes désolé mais pour une raison dont nous ne sommes pas responsables, nous ne pouvons rien te dire au sujet de tes visions.

La colère et la tristesse montaient en Thomasine… Elle avait envie de hurler de taper et de casser tous les objets à porté de main. Pourtant elle resta comme paralysé face à tant d’injustice…

-       Mais nous avons compris à quel point les choses sont difficiles à vivre pour toi.

Sa mère reprit, les larmes aux yeux.

-       Alors nous avons pris une décision mon cœur. Nous allons déménager….
-       NON !!!!!

Le cri que venait de pousser Thomasine venait du cœur. Elle avait déjà quitté tant pour préserver un secret dont elle ne savait rien. Mais son père ne la laissa pas poursuivre.

-       Laisse ta mère t’expliquer Tom !!!!
-       Oui… reprit son épouse

Philomène prit une pause qui sembla une éternité à sa fille. Elle semblait chercher les mots justes pour ne pas créer un nouveau conflit.

-       En fait nous allons déménager à Paris. C’est là qu’avec ton père nous nous sommes connues.
-       Mais je croyais justement que vous en étiez partie parce que tu ne supportais plus la vie stressante de cette ville !!!!, Thomasine hurlait presque.
-       Les choses sont parfois plus compliquées qu’elle n’en ont l’air ma chérie…

Donc ils n’avaient pas quitté Paris pour la campagne… Mais qu’avaient ils fuit ? Thomasine allait poser la question quand sa mère reprit son discours.

-       En réalité… C’est là que se trouve la clé de notre secret… Mais tu te lance dans une quête dangereuse Tom. Nous serons là pour t’aider et te protéger, mais tu devras prendre des risques et des décisions d’adulte. Tu t’en sens capable ?
-       Sans cela, je ne pourrais pas vivre…
-       Bien, repris son père. Sache avant tout que nous ne serons d’aucune aide. Nous sommes lié par ce secret. Nous ne te dirons rien et tu dois avant tout, cesser de nous parler de ce sujet. Si tu te lances dans cette quête, saches que les minutes te sont comptées. Tu ne pourras plus reculer ou dire que tu veux cesser de trouver une réponse à ce secret. Est-ce bien claire ?
-       Je ne comprends rien papa…
-       Je ne peux t’en dire plus. Tu devras faire avec cela.
-       Tu peux me faire confiance papa…
-  Je n’en ai aucun doute, lui répondit son père avec une once de fierté qu’il cherchait à dissimulé.

Les larmes montaient aux yeux de sa mère. Elle se leva pour la serrer dans ses bras.

Le serpent était définitivement mort. Mais Thomasine ne savait pas que des dangers bien plus grands l’attendaient dans sa quête de vérité.



Trois semaines étaient passées. Rapidement, les parents de Thomasine avaient trouvé un logement grâce au travail d’Albin Bastille. Un appartement, dans le 12e, petit certes mais suffisant pour y vivre à trois.

Dès lors, l’inscription au collège du quartier n’avait posé aucun problème. Pour la première fois changer d’établissement ne lui semblait pas si difficile. Cela lui semblait une concession minime pour enfin connaître ce qu’on lui cachait depuis si longtemps, l’essence même de sa vie…

Thomasine remplissait ses cartons soigneusement. Elle observait cette chambre, son refuge, qu’elle allait quitter. « Je quitte ma vie d’enfant » ne pouvait-elle pas s’empêcher de penser. Un pincement au cœur lui arracha un soupir.

Elle jeta un regard au jardin. Le chat se prélassait dans la pelouse, inconscient de l’avenir qui se présentait à lui. Elle ramassa son vieux conte de « Blanche-neige et les sept nains ». Elle le caressa et l’ouvrit pour le parcourir. De la page d’accueil s’échappa une photo, une photo qu’elle ne connaissait pas. Une femme d’une soixantaine d’année, les cheveux blancs, courts, tenait un bébé dans ses bras. Elle approchait la photo pour mieux observer le nourrisson. La poupée !!!! La poupée de chiffon, elle l’aurait reconnue entre mille. Poupée Nina !!!! Sa poupée Nina !!!! Elle se souvenait du discours de sa mère

 « Je te l’ai acheté quand j’étais enceinte de toi. J’étais en vacances à Viennes en Autriche et j’observais cette poupée dans une vitrine. Et je t’ai senti bougé pour la première fois ! Un léger coup sur le coté de mon ventre… Alors je te l’ai acheté en souvenirs… Et tu l’as adopté dès la maternité, dans ta couveuse… »

Ce bébé… Cela ne pouvait qu’être elle-même… Mais cette femme ??? Sa grand-mère ??? Mais c’est impossible… Elle était persuadée qu’elle ne l’avait jamais connu … Mais qui alors ??? Et pourquoi se trouve t-elle là ?


La voix de sa mère la fit sortir de ses rêveries.
« Thomasine ! Tu viens manger ? »

Elle hésita un instant à descendre avec la photo pour poser des questions mais se ravisa.  Les mots résonnaient encore dans ses oreilles « Nous ne pourrons te donner aucune information… »

Elle rangea la photo dans son livre de chevet et rangea son conte d’enfant dans le carton « bibliothèque ».

Elle passa son repas, à donner le change en ne parlant uniquement du prochain déménagement et de la désagréable tâche de faire des cartons. Mais ses pensées restaient bloquées sur cette photo.

Après le repas, Thomasine trouva un vieux carnet rose à spirale que sa tante Lau lui avait offert à son dernier anniversaire. Elle avait enfin trouver une utilité à ce jolie carnet à fleur. Elle saisi le stylo qui était offert avec et incrit sur l’étiquette de la couverture « mon secret ». Comment l’appeler autrement ?

Elle commença à faire une liste des différents indices dont elle disposait.

Liste des choses que je sais

-       Mon don
-       La photo de cette femme et moi bébé
-       Ma vision de Marie-Antoinette
-       Maman a dit que cela faisait 200 ans que nous portions le secret
-       Impossibilité d ‘en parler
-       Paris lieu du secret
-       Philippine

« Marie-Antoinette » et  « 200 ans » était forcément liés. Mais Thomasine ne voyait pas vraiment le lien avec sa famille… « Paris, lieu du secret ». Là aussi, il y avait sans doute un lien avec les deux premiers indices.

« Philippine »… Ce nom ne lui disait définitivement rien… Etait-ce la femme sur la photo ? Etait-ce lié à Marie-Antoinette ?
Par curiosité, Thomasine s’installa devant son ordinateur et tapa directement sur google :

Marie-Antoinette Philippine


Une dizaine de pages se présentent à elle. Mais la première attirait déjà le regard de la jeune fille :

Marie Philippine Lambriquet (la mère) meurt le trente avril 1788 et est inhumée le lendemain. Il semble que c'est suite à ce décès que Marie-Antoinette ...
madame royale.free.fr/lambriquet.htm -
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Thomasine n’en croyait pas ses yeux… « Marie Philippine »… Elle hésita un instant à cliquer sur le lien existant… Elle se doutait que dorénavant rien ne serait pareil.


Marie Philippine Lambriquet est née à Versailles le 31 juillet 1778. La façon curieuse dont elle à été élevée, les confirmations données par des serviteurs de la famille royale ainsi que sa position dans le "Registre des Enfants de France" (registre où sont consignées toutes les dépenses faites exclusivement pour les Enfants de France, c’est-à-dire pour les enfants du roi) nous laissent penser qu'elle est la fille de Louis XVI. Tout comme la "Comtesse des ténèbres", elle n'a jamais rien revendiqué. L'historien Montjoye la supplie de révéler son identité. Elle se marie officiellement à un nommé Prempain, et meurt en 1813, peu avant la Restauration.

La fille de Louis VI ? L’image qui lui était venu à l’esprit lorsqu’elle avait relu sa page de son livre d’histoire, lui revient en mémoire. Ses visages qui lui semblaient si familiers… Marie-Antoinette … Sa fille… Puis une autre vision s’imposa à elle…

De beaux appartements… Des rires de petites filles… Elle ne voyait rien, simplement, elle entendait une petite fille rire aux éclats et une voix d’adulte lui souffler :
-       Mademoiselle Ernestine, il va falloir attraper Madame Royale au moins une fois… Cela fait la troisième partie qu’elle gagne …
La sensation d’un ruban sur les yeux… Les rires d’une enfant…

En quelques secondes Thomasine était revenu à son ordinateur… Madame Royale, oui… Elle avait déjà entendu ce nom en classe… Elle n’en était pas sure, alors elle tapa à nouveau dans la banque de recherche :


Madame Royale


Wikipedia ne laissa aucun doute à ses craintes. Madame royale n’était autre que la fille aînée du couple de Louis XVI et de Marie-Antoinette. La seule à avoir survécu à la révolution…

Mais qu’est ce que sa famille avait à voir avec tout ça ??? Quel était le lien avec cette photo ???

Soudain, elle réalisa que dans sa vision, il ne l’avait pas appelé « philippine » mais « Ernestine ».

Thomasine replongea dans ses recherches…

Ernestine

Marie Philippine est donc adoptée en 1788, peu après la mort de sa mère. La reine la rebaptise Ernestine (peut-être du nom d'une de ses soeurs). Elle est installée chez Mme de Polignac: on peut donc raisonnablement penser que l'"adoption" n'était pas prévue avant le 16 août, date de l'émigration de celle-ci, ou bien que l'on attendait la libération d'un appartement conséquent. Le 26 août, on retire tous les meubles -anciennement l'appartement des filles bâtardes de Louis XIV... - Hypothèse personnelle: Marie Philippine n'est, elle installée au château, adoptée en quelque sorte par la Reine, que le jour... de la Sainte Ernestine, soit le 7 novembre actuellement? En tout cas, c'est deux jours plus tard que le Roi signe le brevet de pension à compter du premier avril. Elle est traitée exactement de la même façon que Madame Royale, reçoit les mêmes fournitures du même prix, prend des cours chez les mêmes professeurs... toutes ces dépenses sont consignées sur le Registre des Enfants de France, registre destiné exclusivement aux Enfants de France, c'est à dire aux enfants du Roi: les enfants du comte d'Artois eux-mêmes n'y sont pas marqués.



-       Ernestine et Philippine ne font qu’une… Mais en quoi cela concerne notre secret de famille ? Pourquoi ces visions ?
  
Thomasine commençait à se demander si ses visions avaient vraiment un rapport avec son secret, si un « esprit » venu de l’au-delà ne voulait pas qu’on l’aide à résoudre un quelconque problème…

Thomasine s’assit sur le bord de la fenêtre et commença à parler avec des esprits imaginaires, attendant une réaction en chaîne. Mais tout resta, normalement calme.

« - Tom ? Tu as fini avec le scotch ? »
Sa mère la ramena à la réalité. Thomasine n’était pas une héroïne de série télé. Son don était plus une charge qu’un cadeau. Elle n’était pas fière de ce qu’elle était. D’ailleurs qu’était-elle  au fond ???

« Ernestine si tu m’entends montre moi la voie à suivre » chuchota t-elle.

Mais rien ne se produisit. Ses recherches allaient être plus rationnelles qu’elle ne le pensait… Du moins c’est ce que l’instant lui laissait croire…
























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